Accords bières & mets : deuxième expérience 10 février 2015

Accords bières & mets : deuxième expérience

Suite au premier souper que notre conseiller Émile avait organisé il y a quelques mois, c’est Jo qui récidive avec un cinq-services d’accords bières et mets. En espérant que cela inspire votre menu des fêtes!

Des cinq services élaborés et accordés par Jonathan et sa copine Valérie, trois étaient en plus cuisinés avec la bière utilisée pour l’accord. Rillettes, sushi-ceviche, Mac’n’cheese réinventé, steak bien saisi, et dessert au bleu… la plupart de ces services ont été inspirés de la science moléculaire de François Chartier, qui construit des recettes et accords en se fiant aux molécules aromatiques contenues dans les ingrédients et les vins ou bières proposés.

Et merci à Genevie Casas pour les belles photos!

Service #1

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La rillette provient d’une pièce de porc braisée dans un jus et pochée dans un gras, puis effilochée et refroidie avant d’être servie. Il est simple de remplacer l’eau par de la bière — ou du vin blanc tel qu’il est coutume dans le sud-ouest de la France. Ici nous avons choisi une bière brune d’inspiration belge et avons assaisonné et préparé l’accord pour rejoindre le profil anisé et caramélisé de la bière.

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Le résultat est un accord qui, une fois mélangé en bouche, fusionne dans une texture plaisante. Nous croyons que la présence de carvi – dans la rillette comme dans le beurre se trouvant sur le crouton — ainsi que d’anis est ce qui a contribué à faire ressortir l’arôme de figues dans la bière, la texture de laquelle se retrouve également changée vers quelque chose de plus lisse une fois en bouche avec la rillette.

Service #2

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L’idée derrière cet accord était de créer une bouchée avec des ingrédients partageant chacun au moins une molécule aromatique avec le gingembre, sans utiliser de gingembre, et d’essayer celle-ci avec deux bières au gingembre. Le curcuma, rhizome-soeur du gingembre, partage avec ce dernier le curcumène (et probablement bien d’autres arômes en différents ratios). Le persil contient d’ailleurs du beta-sesquiphellandrène, l’odeur boisée caractéristique au gingembre. Le citron, responsable de la cuisson du saumon par l’acide, a en commun avec le gingembre le citral, le limonène (surtout dans sa pelure), et autres molécules volatiles.

 

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 Nous avons donc testé cet accord avec 2 bières au gingembre : la Chi de Brasseurs de Montréal, ainsi que la Saison Sorachi Ginger, collaboration Dunham et Pit Caribou. Ce qui rend la deuxième intéressante, c’est la présence de myrcène dans le gingembre, le persil et… le houblon, contribuant au caractère agrumé et sapineux de ce dernier. Les huiles du houblon Sorachi Ace sont normalement en majorité du myrcène.

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Avec la Saison Sorachi, une attaque de conifère se présente aussitôt mélangée en bouche, comme si le myrcène était poussé à ressortir par l’accord. En finale, c’est le zeste confit qui fait poindre des arômes d’orange, probablement dû au limonène, qui est justement caractérisé par une forte odeur d’orange dans sa forme isolée. Au final, le gingembre, d’abord très subtil dans la bière, est mis de l’avant d’une manière équilibrée.

Avec la Chi, c’est la saveur du poisson qui ressort plus dans l’accord, et le gingembre (déjà beaucoup plus présent dans la bière) ressort encore plus, mais la rondeur de la bière s’en voit largement améliorée. Tous comptes faits, l’accord avec la Saison Sorachi était plus intéressant et complexe.

Service #3

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Il n’y avait pas de grande science derrière cet accord, autre que le mélange d’une IPA bien américaine, bien amère et maltée, avec un cheddar fort, c’est très bon. Nous avons poussé l’expérience vers la friture, mais avec moins de succès qu’espéré; le résultat ne tenait pas bien ensemble lors de la friture malgré la congélation de nos « bâtons » au Mac’n’Cheese. La sauce de ce dernier était également coupée à la compote de poire (beurré bosc), ce qui a peut-être nui à la stabilité du produit fini.

 

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Somme toute, c’était tout de même bon, et une bonne bouchée de cheddar avec une gorgée de Distorsion, c’était assez plaisant. À réessayer, avec une friture plus stable et délicate!

Service #4

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Sans conteste la réussite de la soirée, tant du point de vue gustatif qu’au niveau de la complexité de l’élaboration et de la présentation. L’idée était de tourner autour du fameux clou de girofle sans y toucher. Il s’agit d’une épice particulière parce que l’écrasante majorité de son odeur provient d’une seule molécule : l’eugénol. En tournant autour du clou, on s’est amusé à préparer une poire de boeuf en touchant à plusieurs ingrédients qui partagent des molécules aromatiques avec ce dernier.

En débutant avec la plus récente de la brasserie McAuslan, la Pale Ale Oak, une bière dans laquelle ont trempé des morceaux de chêne, nous avons tracé un lien direct avec le clou de girofle via la vanilline, un composé qu’on retrouve en petite quantité dans le clou, souvent en bonne quantité dans les alcools vieillis en fût de chêne, et vous l’aurez deviné, c’est l’arôme dominant de la vanille; la Pale Ale Oak est assez puissante de ce côté.

Nous avons donc utilisé cette bière comme base liquide pour la sauce qui allait recouvrir la pièce de viande, avec de l’ananas, qui contient également de l’eugénol dans sa signature aromatique, ainsi que de la vanilline. Une touche de vanille pour amplifier l’effet « girofle », et des oignons caramélisés pour épaissir le tout une fois passé au mélangeur.

Pour l’assaisonnement, nous avons opté pour une compote de fraise. Pourquoi? Parce que les fraises, surtout cuites et mûres, contiennent un bon ratio d’eugénol dans leur odeur. Nous avons couronné le tout de basilic — puissant émetteur d’eugénol, surtout lorsque fraîchement coupé —, et de noisettes, qui partagent des furfurals avec le clou de girofle et le caramel.

Le résultat était exquis, complexe et long en bouche. L’accord se succédait sur plusieurs étapes, laissant place ici aux saveurs giroflées, là aux saveurs vanillées, et mettait de l’avant la texture tendre d’une poire saisie rapidement sur chaque côté. On va s’en rappeler!

Service #5

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Pour dessert, on a décidé d’aller pour le fromage bleu. Cette fois, rien de trop moléculaire comme base de raisonnement pour construire la recette, simplement du « essai-erreur » qui a donné quelque chose de plaisant.

Nous avons choisi deux bleus, un québécois et un français, pour concocter des « balles bleues » avec des dattes écrasées et avons roulé le tout dans le sésame grillé. Côté présentation et assemblage, on aurait pu travailler quelque chose de plus appétissant, mais le résultat avec la Hibernus était excellent, surtout avec le Bleu D’Élisabeth, où la saveur de bleu était mise de l’avant sans cacher les notes fruitées et épicées de cette bière brune hivernale. Par hasard, nous avons également testé cette bouchée avec la Myrcène de Glace de Glutenberg et Chartier, mais ce fût un grave échec, probablement à cause des dates qui ne s’accordaient pas avec l’acidité vineuse de la bière.

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Ce fut une belle soirée de découverte et de tests, en espérant qu’elle vous inspire à essayer et aller plus loin dans vos accords de bière et mets!

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